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28 août 2006
Des idées de réformes pour renouveller nos politiques
Des réformes institutionnelles pour donner à la France des élus qui ressemblent à ses forces vives
Partons d’un exemple simple : les partis politiques. De l’extérieur, on pourrait croire que c’est une couleur contre l’autre. C’est déjà une perte de temps et d’énergie pour la France incroyable. Pour réaliser les grandes réformes dont la France a besoin, il faudrait que la classe politique cesse sa ridicule obstruction et ses calculs stratégiques qui participe à sa perte de crédibilité.
Il y a plus grave : les guerres internes des partis. On passe plus de temps à jouer des coudes et à s’autodétruire que d’essayer de construire. Finalement, les membres des autres partis politiques représentent un moindre danger face à aux militants de son propre parti. La vie de Jacques Chirac en est un exemple, dans la Tragédie du Président de FOG, l’actuel Président de la République semblait plus ennemi de Balladur et de VGE que de Mitterrand. Regardez le spectacle désolant des éléphants du PS à la veille des Présidentielles, observez François Bayrou rendu inaudible sur le fond de son projet par Gilles de Robien, etc… Ces situations poussées à son paroxysme reflètent une situation à quelque niveau que ce soit dans les partis politiques. Quelle extraordinaire déperdition d’énergie ! Ce phénomène est identique dans les grandes entreprises : les guerres entre les services. C’est certainement humain mais certainement pas acceptable. La compétition qui devrait créer une certaine émulsion, créée de fait une immense paralysie.
Vous avez dit crise de représentativité : c’est vrai, elle est bien réelle. Les Français ne se sentent pas bien représentés par leurs élus. Que ce soit au nom de leurs idées, de leur âge, de leur origine, de leur catégorie socioprofessionnelle. Le 21 avril, le 29 mai, les crises des banlieues et du CPE en sont autant d’exemples terribles. Pour qui voter quand on ne peut pas s’identifier ? La colère et le manque de confiance des français envers leurs élus s’expriment désormais à chaque échéance. Les élections deviennent une vaste loterie, créant un sentiment d’insécurité et empêchant la classe politique de faire les réformes qui s’imposent aux vues du déclin de la France dans tous les domaines.
Le problème de représentation est concentré dans le Parlement, c’est le plus médiatisé et surtout le moins représentatif. Ce phénomène n’opère pas ou peu lorsque l’on parle des Conseils municipaux, régionaux, généraux. Les députés ne représentent pas les Français, ni même leurs électeurs :
- l’âge moyen des parlementaires français est de 56, 5 ans alors qu’il est de 39 ans pour la population française. Plus marquant, la majorité des parlementaires français représentent les générations nées avant 1950. Il n’y a aucun député pour représenter les 0-29 ans qui représentent 37,8 % de la population.
- leur catégorie socioprofessionnelle : des catégories sont surreprésentées : les fonctionnaires (40% contre 11,3% dans la population française), les professions indépendantes (20,6% contre 0, 7%), les enseignants (18, 7% contre 3, 1%).
- leur diversité d’origine, il suffit de regarder les visages de l’hémicycle pour comprendre que l’Assemblée Nationale est homogène et ne représente pas l’ensemble des français issus de l’immigration.
- leur sexe, alors que la population française est composée de 51% de femmes, elles ne sont que 13% à l’Assemblée.
- leur couleur politique, x % de électeurs ne sont pas représentés à l’AN.
De plus, le renouvellement du personnel politique ne se peut se réaliser au regard de la moyenne de l’ancienneté dans les mandats : 19,54 ans, ainsi que du fait du cumul des mandats.
Statistiques tirées de l’Origine sociologique des parlementaires par Bertrand Lemennicier, professeur d’économie à Paris II
L’investiture unique pour les scrutins uninominaux provoque des effets pervers. Dans tous les partis, les militants, notamment les nombreux jeunes ou primo candidats à l’investiture ressentent les mêmes sentiments de solitude et d’injustice. On n’imagine pas à quoi peut ressembler une course à l’investiture dans un parti. C’est un moment d’extrême solitude, plus rien ne compte sauf sa propre personne, plus d’amis, plus d’équipe ou d’affinité qui tienne. C’est à l’encontre d’une recherche d’intérêt général. Celui qui gagnera sera celui qui a le maximum de réseau, celui qui aura les moyens de se payer une campagne, celui dont l’origine, le nom ou le sexe fera des voix ou sera un alibi pour le parti afin de démontrer sa bonne conduite et échapper aux amendes. Rien à voir avec le mérite, les compétences ou la motivation.
Ce qui crée irrémédiablement des ressentiments, des aigris, des écorchés vifs, un grand nombre d’entre eux se détourne de la politique, emportant avec eux des militants impuissants et qui découvrent douloureusement l’envers du décor. La démocratie perd de son sens, surtout en interne. Comment voulez-vous parler de respect de la démocratie alors que dès la vie militante, les décisions sont souvent arbitraires ?
Cela ne risque pas de changer : il n’existe pas de transmission de savoir, de compétences, de savoir vivre, de partage d’expérience entre les élus et les militants. La vie politique est une lutte, contre les autres, surtout les bons, d’ailleurs, mais aussi contre soit même. Contre ses propres perversions, une lutte pour ne pas perdre sa famille, ses amis, sa tête, contre le tourbillon de la vie publique. Pourquoi les élus répètent les mêmes erreurs? Parce qu’une fois qu’on est élu, on ne veut plus partir. En effet, les sacrifices consentis pour y arriver entraînent des conséquences irrémédiables : improbabilité de retrouver un travail si l’on est pas fonctionnaire, la vie privée est très souvent mal en point, la raison d’être est perdue si l’on n’exerce plus. En effet, les mandats vous donnent une vie sociale, une reconnaissance, qui s’effondrent le jour où le mandat s’arrête.
Pourquoi ces sujets sont-ils tabous dans les partis ? Pourquoi personne ne met en garde les jeunes générations ? Pourquoi ne pas essayer de trouver des solutions ? Pourquoi ce processus digne des plus mauvais bizutages où ne survivent que les pires perdure ?
Pourquoi faire d’une motivation tournée vers l’intérêt général à l’origine, le comble de l’ambition personnelle et de l’égocentrisme.
J’ai l’intime conviction que cela peut changer, que les jeunes et les plus âgés pourront un jour arrêter de penser qu’ils représentent un danger les uns pour les autres. Qu’ensemble ils détiennent des compétences, des énergies complémentaires pour construire le projet de la France. Quand les plus âgés détiennent l’indispensable expérience, la connaissance d’aujourd’hui, les plus jeunes ont l’énergie, la fougue, l’idéal vissés aux tripes, l’envie de construire le lendemain et le surlendemain.
Comment construire la France de demain avec des individus qui ont 60 ans aujourd’hui (l’âge de la retraite dans le privé !). Ils ne seront plus là pour subir les conséquences économiques, environnementales, sociales des décisions prises aujourd’hui ? Des individus dont l’objectif premier au regard des faits cités plus haut est de se faire réélire pour ne pas replonger dans l’anonymat ?
Ne pas accepter ce qui semble immuable : plusieurs idées qui sont des remèdes de cheval, pour une situation catastrophique.
Changeons les règles du jeu. Limitons le nombre de mandats dans les temps : un mandat renouvelable une fois maximum pour faire de l’exercice du pouvoir une étape de vie au service de la cité. Adoptons le strict non-cumul des mandats pour permettre au plus grand nombre d’exercer, mais aussi un temps plein consacré à un seul mandat, sans conflit d’intérêt. Incluons une dose de proportionnelle pour permettre à toutes les idées d’être débattues et cesser la victimisation des extrêmes et le privilège qui leur est accordé d’avoir une large tribune médiatique sans jamais proposer des idées crédibles et réalistes rencontrant la sanction du vote dans l’hémicycle.
Prenons en compte le vote blanc, il permettrait aux citoyens de montrer qu’ils ne peuvent pas s’identifier et provoquer ainsi une prise de conscience chez les politiques au lieu de faire monter les extrêmes.
Autre idée pour faire face à la guerre des générations : établissons un partenariat entre les âges face au suffrage lors des législatives. Autant les autres points ci-dessus ont été déjà largement expliqués et recueillent déjà un grand nombre de soutien de nombreux Français, autant ce dernier point mérite quelques explications.
Divisons par deux le nombre de circonscriptions législatives. Établissons un scrutin binominal. Avec pour seule obligation pour ces duos d’avoir un candidat ayant moins de 40 ans, et un au-dessus, de sexe différent. Idem pour leurs suppléants, à l’inverse.
La campagne se mènerait ensemble, créerait un sentiment d’équipe, reflèterait mieux les aspirations des électeurs qui pourraient s’identifier à l’un des 4 candidats confronterait plusieurs visions complémentaires, plusieurs sensibilités, … Il ne serait plus question d’affrontement entre président de fédération, par exemple, et jeunes ou nouveaux arrivés de la société civile. Cela offrirait de nombreuses options afin de permettre à tous d’être représentés, hommes, femmes, issus de la société civile et du privé, jeunes et moins jeunes, origine diverses, etc…
Une fois élus, ces binômes auraient l’obligation d’être dans les commissions différentes. Pour travailler sur des lois répondant à l’attente d’un maximum de leurs électeurs.
Ensuite à l’Assemblée, pourrait avoir enfin un débat intéressant non seulement sur les orientations politiques partisanes, mais aussi sur une vision d’avenir.
Pour commencer leur mandat, les élus auraient un mois de formation sur le fonctionnement de l’Assemblée, comment rédiger des lois, une mise à niveau pour tous les élus. En effet nos parlementaires sont livrés à eux même dans l’exercice d’un mandat qui ne s’improvise pas !
De plus, à la fin du mandat serait mise en place une période de transition et de retour à l’emploi avec des aides et des formations pour permettre aux anciens élus de se réadapter aux avancées de leur profession.
Ce temps de formation et d’aide au retour à l’emploi serait d’ailleurs nécessaire à tous les élus, quelqu’ils soient.
Si nous ne faisons rien, le renouvellement du personnel politique n’aura pas lieu et la crise que nous connaissons aujourd’hui créera les conditions d’une situation insurrectionnelle dont nous avons parfois les quelques frémissements.
La classe politique d’aujourd’hui ne le souhaite pas vraiment, car ils reproduisent ce qu’ils ont vécu et protègent un système qui les fait princes de la République.
De plus, investir ici ou là des candidats censés représenter des minorités n’a aucune chance de marcher :
En ce qui concerne les jeunes, notre population vieillissante n’élira que ceux qui leur ressemblent et qui défendront leurs intérêts, le conservatisme, penchant naturel chez les personnes atteignant un certain âge, sera donc de mise.
En ce qui concerne les personnes françaises choisies pour leur origine ou leur couleur de peau, elles auraient du mal à se faire élire si les électeurs sentaient que ces investitures étaient des alibis et cette situation provoquerait irrémédiablement des votes communautaires dans des villes pluriethniques. Ce mode de scrutin pourrait apporter de nombreuses combinaisons pour faire accéder ces personnes à l’exercice de responsabilités civiques.
Plus besoin de quotas, tout serait une affaire de représentation de la diversité d’une circonscription, des couches sociales, des catégories socio professionnelles, d’âge, de sexe.
Ceci n’est qu’un rêve, mais si seulement il devenait réalité…
La vie politique n’en deviendrait que plus accessible, plus passionnante, plus complète pour les « spectateurs décideurs électeur s», et une expérience de vie extraordinaire pour les citoyens s’engageant pour un temps donné au service du pays.
A l’instar de notre ancien service militaire, et de notre futur service civil tant espéré, ce temps civique déterminé contribuerait à la prise de responsabilité, de conscience citoyenne, de lien par un brassage social pour construire un projet ENSEMBLE.
La guerre générationnelle qui pointe son nez serait une terrible erreur, nous en sommes tous conscients. Unissons nos talents et nos qualités. Par ce type de réforme, notre Parlement serait ainsi à l’image des multiples forces vives qui compose notre belle société française et reconstruirait le lien de confiance aujourd’hui brisé entre les Français et leurs représentants.
Ce rêve pourrait devenir une réalité si nous en décidons ainsi.
02:10 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
De bonne idées !.
Pour le Sénat, je partage vos avis !.
( les sénateurs qui siège aujourd'hui, bien qu'ils aient voté la réduction de la durée de leur mandat ( à venir ) à 6 ans, vont sieger pendant DIX ans.
Pour l'Assemblé Nationale, une augmentation du nombre de circonscription est prévue par la loi ( en raison de l'évolution de la population ).
Je serai partisan d'un scrutin uninominal à UN TOUR ( à l'anglaise ), avec limitation et vrai non cumul. pour les deux assemblées
La proportionnelle que vous revendiquez, a une perversion :
Les listes, puisqu'il doit y avoir obligatoirement des listes de candidats, seront composées ( par les états majors ), d'ami sà placer !.
Et pourquoi pas effectuer un tirage au sort, parmi les citoyens, afin de pourvoir aux assemblées ?.
Écrit par : Claude | 28 août 2006
Merci pour ces propositions. Plusieurs points me semblent très intéressants pour engager un débat mais discutables, justement ;-).
Quelques premières notes: ce sur quoi je ne suis pas d'accord
1) Pourquoi d'abord l'âge?
"Pour qui voter quand on ne peut pas s’identifier ?" Ne peut-on pas souvent s'identifier plus facilement avec quelqu'un dont l'âge, le sexe, la catégorie sociale ne sont pas les vôtres mais qui aura une ouverture, un courage, un enthousiasme, une qualité personnelle qui vous toucheront? Cela ne signifie donc aucunement qu'il faille des jeunes pour les jeunes ou des femmes pour les femmes.
"notre population vieillissante n’élira que ceux qui leur ressemblent", dans le même genre, est plus que contestable aussi - cela relève du préjugé, et j'en dirais autant de "le conservatisme, penchant naturel chez les personnes atteignant un certain âge"; je crois que le programme politique, la campagne, la qualité de la personne comptent bien plus que ce genre de critère. Je crois aussi qu'il y a une demande des électeurs de tous âges, pas seulement jeunes, pour un changement, pas pour le conservatisme, et que c'est surtout l'offre de candidats non conservateurs (et de projets) dans les grands partis qui pèche.
De même je crois parfaitement possible de construire avec un candidat de 60 ans la France de demain, ou de faire du surplace avec un candidat de 30 ans. Il n'y a pas de fatalité à manquer d'idéal ou d'énergie avec l'âge, et c'est heureux. Je crois qu'il y a même des forces intérieures nécessaires qui ne viennent qu'avec le temps mis à les construire, inlassablement, parce qu'elles ne sont pas données facilement. Peut-être es-tu pressée, aussi ;-) .
2) L'investiture aux législatives
Je serais tenté de dire qu'il est légitime que la campagne soit une mise à nu, et que cela est bien dans l'intérêt des électeurs - il faut que cela ait lieu avant l'élection. Une lutte contre soi-même, bien sûr. Est-ce anormal? L'investiture aux législatives n'est aussi qu'une première expérience de cela. Dans la proportionnelle, l'inconvénient se reporte sur l'investiture, davantage encore à la discrétion des grands chefs et objet de bataille de réseaux parfois.
Il me semble que les défauts actuels tiennent surtout au fonctionnement interne des partis, et je revendiquerais par exemple une place plus grande donnée au vote des militants dans les investitures.
3) Le fonctionnement en équipe aux élections
Pourquoi vouloir être investi dans des législatives si l'on aime le travail comme il se fait dans les municipalités? Choisir d'assumer ou non une candidature en fonction de ses capacités humaines et de ses compétences est nécessaire aussi.
Les mandats municipaux, par exemple, permettent une transmission de compétences et d'expérience, un fonctionnement en équipe. Le cas du Parlement est particulier, plus solitaire, mais cela changerait avec un travail approfondi en groupe parlementaire avec moins de temps passé en circonscription, et donc l'introduction de la proportionnelle qui a l'avantage d'être une élection d'équipe.
Je ne suis pas convaincu par le système binominal: qu'il y ait 2 ou 4 députés sur la même circonscription n'empêchera pas qu'il n'y ait pas de place pour un numéro 3 ou 5... et choisir le critère de l'âge n'est pas convaincant: pourquoi surreprésenter ainsi les jeunes et non choisir de surreprésenter telle catégorie du corps électoral? Il n'y a pas de légitimité démocratique à imposer cela.
Peut-être ta proposition de système binominal est-elle un écho d'un désir de voir un scrutin de liste comme aux municipales s'imposer, par exemple par départements, mais alors il serait logique qu'au lieu de choisir tous les membres d'une liste on les élise à la proportionnelle. Avec l'inconvénient d'avoir surtout des votes pour la tête de liste dans la tête des électeurs. Je reste perplexe.
Je ne crois pas non plus que ces propositions changeraient quelque chose à l'absence de débat au parlement aujourd'hui, qui a d'autres causes.
4) Les partis ont un rôle
Un certain nombre de tes propositions laissent affleurer la tentation de remettre à d'autres le soin de faire ce que les partis aujourd'hui font mal: former leurs candidats à la députation, leurs militants, etc. Il faut exiger d'eux qu'ils remplissent ce rôle, et empêcher certains de se fabriquer des rentes de situation (financement, etc) pour que ceux-ci puissent plus facilement évoluer, naître ou disparaître, sans doute, mais leur laisser le travail qui leur revient. Le mois de formation des élus me semble ainsi une erreur: c'est au groupe parlementaire de mettre en place ce genre de chose, et au parti de le faire non pour les élus, mais pour les candidats d'abord. Je sais, ce n'est pas fait aujourd'hui, et il faut réformer les partis (il y a besoin de pas mal de rénovation en fait!). Mais c'est leur rôle.
5) Pourquoi une investiture?
Le militantisme ne passe a priori pas par une investiture, justement; celle-ci est un cas exceptionnel et le travail militant n'a pas l'investiture comme finalité - et heureusement. Pourquoi l’ambition personnelle? Pourquoi pas, bien sûr, si elle peut se faire heureusement (le cas de Marielle me semble intéressant). Ce qui mine, dans ta description, c'est le goût du pouvoir, pas le militantisme. En tant que militant, ma vocation n'est certainement pas de me faire élire prioritairement, même si cela m'intéresse. Je me bas pour des idées et des projets d'abord, vraiment.
Écrit par : Cratyle | 12 septembre 2006