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27 novembre 2008

Lettre des parents des inculpés de Tarnac

Je souhaite porter à votre connaissance l'excellent article d'André Gunthert sur le traitement médiatique hallucinant auquel nous avons eu le droit pour l'affaire des caténaires SNCF et les jeunes inculpés de Tarnac.

Rappelez-vous, nous en avons déjà parlé, ici. A lire aussi, un autre billet d'un camarade d'étude de Julien Coupat, Olivier Pascault, sur Beta politique. Dernier article qui m'a intéressé il y a déjà quelques jours, chez Bakchich.info.

Je tiens ici à rééquilibrer le poids de l'information, les médias traditionnels ont déversé les mêmes flots d'arguments, quasiment à l'identique d'ailleurs, sans trop se poser de question manifestement.. Nous devons avoir plusieurs sons de cloche pour nous forger une opinion. La lettre des parents ci-dessous donne aussi une autre version de que les médias nous ont vendu.  Mon blog, nos blogs sont autant de médias, mais eux, ils sont "libres". Apprenons à nous écouter, à nous informer, à comparer, à chercher les sources..., les médias ont traité de manière partiale, consciemment ou inconsciemment, font des amalgames douteux, des raccourcis dangereux, nous plaçant tous dans la catégorie de "terroristes". Qui n'a pas fait les manif anti-CPE ? Qui n'aurait pas aimé être à Vichy le jour du grand scandale du Sommet européen de l'intégration organisé par Monsieur Hortefeux ? Intégration, un objectif national ? Faîtes moi rire, le budget intégration a été divisé par deux, en revanche, celui des reconduites, expulsions, etc... a augmenté. En tous les cas, moi, Quitterie Delmas, j'étais aux manifs anti-cpe, j'aurais beaucoup aimé rejoindre les manifestants à Vichy. Je ne suis pourtant pas une terroriste. Comme vous, je suis engagée, peut être tout simplement comme eux, sous différentes formes en tous les cas, en "résistance" vis à vis d'un système.

Bref, apprenons à décrypter tout cela, si nous ne sommes pas éveillés, demain, ce sera nous. Je ne connais pas ces gens, je pense que cette histoire est trop facile pour ne pas être louche. Je leur donne donc la parole :

"Lorsque la cacophonie s’accorde pour traîner dans la boue une poignée de jeunes emmurés, il est très difficile de trouver le ton juste qui fasse cesser le vacarme; laisser place à plus de vérité.
Certains médias se sont empressés d’accréditer la thèse affirmée par la ministre de l’intérieur dans sa conférence de presse, alors que les perquisitions étaient en cours : Les personnes arrêtées étaient d’emblée condamnées.

Personne n’aura pu rater l’épisode de “police-réalité” que nous avons tous subi la semaine passée. L’angoisse, la peur, les pleurs nous ont submergé et continuent à le faire. Mais ce qui nous a le plus blessés, le plus anéanti, ce sont les marées de mensonges déversées. Aujourd’hui ce sont nos enfants, demain ce pourrait être les vôtres.

Abasourdis, nous le sommes encore, paralysés nous ne le sommes plus. Les quelques évidences qui suivent tentent de rétablir la vérité et de faire taire la vindicte.

Les interpellés ont à l’évidence bénéficié d’un traitement spécial, enfermés pendant 96 heures, cela devait faire d’eux des personnes hors normes. La police les suspecte d’être trop organisés, de vouloir localement subvenir à leurs besoins élémentaires, d’avoir dans un village repris une épicerie qui fermait, d’avoir cultivé des terres abandonnées, d’avoir organisé le ravitaillement en nourriture des personnes agées des alentours.

Nos enfants ont été qualifiés de radicaux. Radical, dans le dictionnaire, signifie prendre le problème à la racine. A Tarnac, ils plantaient des carottes sans chef ni leader. Ils pensent que la vie, l’intelligence et les décisions sont plus joyeuses lorsqu’elles sont collectives.

Nous sommes bien obligés de dire à Michelle Alliot Marie que si la simple lecture du livre “L’insurrection qui vient” du Comité Invisible fait d’une personne un terroriste, à force d’en parler elle risque de bientôt avoir à en dénombrer des milliers sur son territoire. Ce livre, pour qui prend le temps de le lire, n’est pas un “bréviaire terroriste”, mais un essai politique qui tente d’ouvrir de nouvelles perspectives.

Aujourd’hui, des financiers responsables de la plus grosse crise économique mondiale de ces 80 dernières années gardent leur liberté de mouvement, ne manquant pas de plonger dans la misère des millions de personnes, alors que nos enfants, eux, uniquement soupçonnés d’avoir débranchés quelques trains, sont enfermés et encourent jusqu’ à 20 ans de prison.

L’opération policière la plus impressionante n’aura pas été de braquer cagoulé un nourrisson de neuf mois en plein sommeil mais plutôt de parvenir à faire croire que la volonté de changer un monde si parfait ne pouvait émaner que de la tête de détraqués mentaux, assassins en puissance. Lorsque les portes claquent, nous avons peur que ce soient les cagoules qui surgissent. Lorsque les portent s’ouvrent, nous rêvons de voir nos enfants revenir.

Que devient la présomption d’innocence ?
Nous demandons qu’ils soient libérés durant le temps de l’enquête et que soient evidemment abandonnée toute qualification de terrorisme.

PS: Nous tenons à saluer et à remercier les habitants de Tarnac qui préfèrent croire ce qu’ils vivent que ce qu’ils voient à la télé."